Conflits à l’école via le numérique : comment les gérer ?

29 décembre 2016

Comment sanctionner à l’école un mauvais comportement dû au numérique quand celui-ci relève de la sphère privée ? Est-ce une question d’éducation ? Le groupe de recherche sur la Sanction a pris comme un des cas d’étude celui de Christine Caricondo, directrice du collège Sévigné – Marseille.

 

Comment sanctionner un mauvais comportement lié à l’usage du numérique ?

SMS et réseaux sociaux sont facilement accessibles pour chaque jeune avec leur smartphone. Insulter un camarade par SMS ou filmer une situation compromettante par Snapchat ; les jeunes partagent trop rapidement des médias qui peuvent blesser la victime ou créer des conflits sur la cour de récréation ! Pour le personnel éducatif, rien de simple : comment gérer ce qui relève de la sphère privée – en dehors de l’école – quand le conflit y arrive finalement. Pour Christine Caricondo, directrice du collège Sévigné – Marseille, il faut s’appuyer sur le règlement intérieur : « Dans tout règlement, il y a “ se respecter entre jeunes et entre jeunes et adultes ”. Si certains élèves ressentent un manque de respect, nous intervenons. Nous ne punissons pas sur les messages mais sur les disputes car souvent ce qu’ils écrivent sur les réseaux sociaux se répète dans la cour. »

« Nous ne punissons pas sur les messages
mais sur les disputes… »

La sanction au service de l’Éducation…

Beaucoup, comme Christine Albanel, ex-ministre et directrice de la responsabilité sociale chez Orange, estiment que « l’intégration du codage dans les programmes scolaires est une bonne chose, mais il faudrait aussi y inclure une formation de l’esprit critique permettant de détecter le faux. Le meilleur moment pour le faire doit être les premières années du collège. »1 Car souvent les jeunes – et adultes – prennent les informations au premier degré, sans recul, sans voir la portée de ce qu’ils partagent. Pour Christine Caricondo, « quand j’interviens, la réaction des jeunes, c’est “ Mais madame, on rigolait… ! ”. Ils n’ont plus conscience de l’injure, de la portée des mots ou de l’indécence de certaines photos. Ces jeunes sont généralement bien éduqués mais ils ont des problèmes de rapport au langage. »

« quand j’interviens, la réaction des jeunes,
c’est “ Mais madame, on rigolait… ! ”. »

Une recherche à partir du « terrain » au service de l’éducation

 

Le groupe de recherche
sur la sanction et parole du jeune

Une recherche-action a été menée durant trois ans sur la place de la parole du jeune dans le dispositif de sanction. La recherche, menée par le service formation des Maisons Don Bosco. Elle est pilotée par Emmanuel Besnard, salésien et éducateur, directeur du Valdocco – Nice.

« Nous avons travaillé sur une étude de cas. En réalité, la plupart des jeunes agissent sur le moment. Ils ne se rendent pas compte des conséquences que cela peut avoir : les souffrances, la dépression. Ils vont très loin sans s’en rendre compte. Face à ces situations, il n’y a pas une réponse unique : nous allons de la remarque à l’observation, jusqu’à l’avertissement. C’est difficile de dire : nous avons la clé. Chaque jeune a sa personnalité, ses réactions. Cela doit être géré au cas par cas.

 

Nous constatons que le numérique fait partie de la constitution des jeunes C’est une problématique propre à l’adolescence : il y a cette obligation d’être sur les réseaux sociaux. Il faut les éduquer, il faut être des repères, nous adultes. » ajoute Christine Caricondo.

Car le travail du groupe de recherche sur la sanction se fait à partir d’interviews recueillies auprès d’élèves de 4è scolarisés dans plusieurs établissements du réseau Don Bosco : Notre-Dame des Minimes à Lyon, le collège Sévigné à Marseille, la Fondation Don Bosco à Nice, le collège La Navarre à La Crau, le lycée agricole du Bocage à Chambery. Il aide ainsi chaque éducateur ou professeur à parfaire son acte éducatif, y compris grâce à la sanction.

« Cela m’a permis d’y réfléchir. La recherche a modifié ma pratique. Je vais à la rentrée demander à mon équipe d’enseignants de travailler sur cette question : comment faire en sorte d’éduquer les jeunes à l’utilisation du numérique. Quelles propositions concrètes ?

Nous allons préparer des supports pour aider les personnes en responsabilité éducative à réfléchir sur l’éducation au numérique et les tester. Nous avons beaucoup d’idées, mais il faut toujours expérimenter pour être certain que cela marche. » conclut Christine Caricondo, directrice du collège Sévigné – Marseille.

Propos recueillis par Hélène Boissière-Mabille
Article de Sébastien Robert

1 : Interview dans La Croix du 27 décembre 2016

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