« Va à la pompe ! » L’éducation selon Don Bosco

20 juillet 2018

« Va à la pompe ! » L’éducation selon Don Bosco

Lorsque des éducateurs se plaignaient auprès de Don Bosco de ne pas être écoutés par les jeunes et de ne pas savoir comment les prendre, Don Bosco disait : « Va à la pompe ». Il y avait, dans la cour du Valdocco, une fontaine autour de laquelle il y avait toujours un attroupement de jeunes qui se bousculaient pour boire ou pour ramollir la pagnote trop dure du petit déjeuner. C’est là que l’éducateur, en se mêlant à la file, pouvait entendre les conversations, connaître les centres d’intérêt des garçons, leurs préoccupations du moment. L’éducateur était ainsi en prise directe sur leur culture et pouvait sentir l’atmosphère générale. Don Bosco suggérait aussi à l’éducateur d’être moins dur, moins rigide, de « ramollir » son quotidien.

 

La cour de récréation a toujours été un lieu privilégié dans le système préventif de Don Bosco, à part égale avec la classe, l’église, les chambres et les réfectoires. Lieu d’éducation informelle, mais qui n’est pas laissée au hasard pour autant. Don Bosco, qui a peu théorisé au sujet de son système pédagogique, a pris la peine, à la fin de sa vie, de mettre par écrit sa pensée dans une lettre datée du 10 mai 1884 à Rome. Il choisit de lui donner la forme d’un songe, ou d’une rêverie.

Un ennui, une lassitude, une mauvaise humeur, une méfiance

Le spectacle de la cour d’autrefois était : « la familiarité produit l’affection, et l’affection engendre la confiance. Voilà ce qui ouvre les cœurs… les garçons se soumettent avec docilité à tous les ordres de quelqu’un dont ils sont sûrs d’être aimés. »

Mais peu à peu les choses ont changé : on lit dans les gestes et les visages un ennui, une lassitude, une mauvaise humeur, une méfiance qui fait mal au cœur. D’où les conciliabules, les conversations à mi-voix, les critiques, avec pour conséquence que beaucoup ne suivent pas leur vocation. Pourtant, les professeurs et éducateurs se donnent du mal, ils travaillent beaucoup. Ce n’est pas suffisant, il faut « Que non seulement les garçons soient aimés, mais qu’ils se sachent aimés ! ». Et pour cela : « Qu’ils soient aimés en ce qui leur plaît, que l’on s’adapte à leurs goûts de jeunes garçons, et qu’ils apprennent ainsi à découvrir l’amour en des choses qui naturellement ne leur plaisent guère… »

Les enfants sont les rois de la cour de récré

« Depuis un an, je viens tous les matins sur la cour de récréation de l’école La Providence du le 20ème arrondissement de Paris. J’aime cette présence gratuite auprès des enfants. Il n’y a pas une volonté d’enseigner ou d’animer. Il s’agit juste d’être présent. Ce sont les enfants qui viennent à moi, ils engagent la conversation ou ils m’invitent à jouer. Ils sont à l’initiative de la relation. J’interviens peu. Parfois quand il y a des disputes, ou des tensions, je passe un bref message, un mot à l’oreille.

Cette présence sur la cour a un impact positif sur les temps plus formels que j’ai avec eux. En effet, durant le temps de midi, j’anime un temps de réflexion que l’on l’appelle « la Petite Communauté Chrétienne », ouverte aux musulmans comme aux chrétiens. Quand j’ai besoin d’un moment d’attention, je peux interpeller les jeunes par leur nom, je les connais, cela va plus vite. Et je peux faire le lien entre ce qu’ils vivent et le contenu de la formation. »

Nicolas Schreiber, éducateur, Paris XXème

Ce que les jeunes veulent, ce sont des personnes « significatives » sur la cour

Il ne suffit pas d’être sur la cour. Ce que les jeunes veulent, ce sont des personnes « significatives », consistantes, qui, d’une part, s’impliquent pour eux en faisant bien leur travail de professeur, de maître d’atelier, d’économe, de directeur, et qui deviennent au moment de la récréation, des meneurs de jeu, des partenaires, des conteurs. Ces adultes sont des figures de père, de frère ou d’ami confident.

Il y a dans les écoles bien des raisons pour les professeurs de ne pas être présents sur la cour, ne serait-ce que pour souffler entre deux plages de cours, vérifier son matériel, et rencontrer les collègues avec qui on fait équipe. Mais il y a des moyens, petits et grands pour vivre des moments de proximité, de familiarité, par des initiatives comme une visite en ville, une sortie culturelle, une compétition sportive, une heure de jeu, ou un simple message de sympathie…

 

Jean-François Meurs

 

Oeuvres salésiennes