P. Xavier de Verchère sur RCF : « Un an après le rapport Sauvé, l’exigence de transparence »

Chaque mercredi matin, RCF diffuse sur ses ondes nationales la chronique des Salésiens. Cette semaine, le père Xavier de Verchère, salésien de Don Bosco, prêtre, aumônier général des Scouts et Guides de France, nous propose : « Un an après le rapport Sauvé, l’exigence de transparence »

Le 05 octobre 2021, le Président de la CIASE, Jean-Marc Sauvé, remettait son rapport. Nous avons en mémoire l’onde de choc que ce fut pour l’Eglise de France. Mais ce « devoir de vérité » était urgent et nécessaire.  Saluons encore ce matin les victimes – pardon, tous les témoins – qui ont eu le courage de se présenter devant la commission Sauvé.

Un an après, me revient en mémoire ce moment si éprouvant vécu lors de l’Assemblée plénière à Lourdes sous un pâle soleil d’automne : le geste mémoriel, cette la plaque dévoilant ce visage d’enfant en pleure ; mais aussi les mots si forts de chacun, le discours de Mgr de Moulin-Beaufort « Petit enfant qui pleure… », et enfin la reconnaissance de la responsabilité et des résolutions pour agir. Nous étions autour des évêques, mouvements d’Eglise, dans une profonde peine, avec de la colère aussi. Je crois n’avoir pas vécu de moment aussi difficile et aussi fort.

Xavier, pensez-vous que ce processus de prise de conscience et de réforme est irréversible ?
Je crois qu’il est irréversible mais il faut rester vigilant : après 8 mois d’existence, nos deux instances de reconnaissances et de réparations travaillent. Il est vrai que cela ne va pas assez vite. Reconnaissons aussi qu’elles ont le mérite d’exister et ce, au niveau national, d’avoir su s’inventer en partant de rien, sans modèle, ni argent. Reconnaissons combien le temps est nécessaire pour suivre chaque situation – non comme un dossier de plus – mais en tant que personne avec son histoire. Pensons à la délicatesse dont doivent faire preuves les référents pour ne réactiver le trauma des victimes. C’est du « sur-mesure » ! L’engagement de l’Eglise de France a permis à d’autres confessions d’emboiter le pas. Espérons que d’autres commissions indépendantes voient le jour en France. Il doit y avoir un avant et un après CIASE : ce devoir de vigilance, d’écoute, de protection des jeunes et des plus fragiles, c’est essentiel pour que l’Eglise garde sa crédibilité.
Quelques phrases de l’Evangile me sont venues à l’esprit. Une fois de plus, le Christ nous met en garde contre les perversions humaines, les dérives de toute institution et veut nous en libérer. A surligner dans nos Bibles ! Par exemple : « Celui qui fait la vérité vient à la lumière » (Jn 3,21), « Jésus les envoya deux par deux. », afin que ses disciples ne risquent d’être seuls « Quand vous priez ne soyez pas comme les hypocrites, [puis vient le Notre Père] Remets-nous nos dettes, comme nous-mêmes avons remis à nos débiteurs. ». Jean Marc Sauvé a bien souligné combien ce passage d’une logique de don aux victimes à l’acquittement d’une dette fut essentielle. « Ce ne sont pas ceux qui disent Seigneur, Seigneur, qui entreront dans le Royaume mais celui qui fait la volonté de mon Père ! » (Mt 7). Traduisons : ne soyons pas d’abord une Eglise avec de beaux discours, soyons d’abord l’Eglise en régime d’incarnation, en conversion permanente, qui agit non selon sa volonté mais celle de Dieu. Faut-il rappeler ces lignes rouges : « Quiconque scandalise un seul de ces petits qui croient en moi, il serait de son intérêt qu’on lui suspende une meule d’âne autour du coup et qu’on le précipite dans les profondeurs de la mer. » (Mt 18) !

L’Eglise est-elle aujourd’hui une « Maison sûre » ?
Difficile à dire à ce stade. Mais pour qu’elle le devienne, l’exigence est à la formation, à la transparence, à la professionnalisation, à l’écoute mutuelle, aux débats toujours éclairés par les Ecritures. On ne peut plus gérer l’Eglise « à l’ancienne ». La synodalité est sans doute la clé. Avancer ensemble : diocèses, congrégations, associations, mouvements. Nous ne sommes pas des chevaux de courses, les uns à côté des autres. Nous sommes un corps, le Corps du Christ ! Sans être d’accord sur tout, aidons-nous mutuellement, trouver des consensus différenciés, à l’exemple du collectif Promesses d’Eglise où l’expérience de l’un, l’expertise de l’autre aident à devenir plus conscients et responsables.

P. Xavier de Verchère

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