Assises du réseau Don Bosco Action sociale (DBAS) : « S’allier pour ne pas courir le risque de perdre notre spécificité salésienne »

26 mai 2023

Assises du réseau Don Bosco Action sociale (DBAS) : « S’allier pour ne pas courir le risque de perdre notre spécificité salésienne »

Jeudi 25 et vendredi 26 mai, se sont tenues à Caen les troisièmes assises du réseau DBAS, après celles de Bordeaux en 2018 et de Lyon en 2021. Une centaine de directeurs, de cadres et d’administrateurs des 24 associations adhérentes (pour une centaine d’établissements et services différents) en France, en Belgique et au Maroc étaient présents. Le coordinateur du réseau, Jean-Marie Petitclerc, évoque les enjeux en cours et à venir.

Jean-Marie Petitclerc, coordinateur du réseau DBAS.

DBAS, son originalité dans le monde de l’action sociale
J.-M. Petitclerc : « Rappelons que les premières assises, qui ont en quelque sorte constitué l’événement fondateur du réseau, ont eu lieu en mai 2018, il y a juste cinq ans. L’originalité de ce réseau consiste en son caractère fédératif (chaque association garde sa propre gouvernance), sa diversité, tant sur le plan de la taille des associations que celui de la diversité de leurs missions, dans le domaine de la prévention, de la protection de l’enfance, de la protection judiciaire de la jeunesse et de l’insertion socio-professionnelle. Sa spécificité, dans le champ de l’action sociale auprès de la jeunesse en difficulté, réside dans sa référence à la pédagogie de Jean Bosco. »

 

Grandir encore ?
J.-M. Petitclerc : « Depuis sa création, le réseau a grandi, d’une part avec l’arrivée de nouvelles associations (la bergerie de Faucon de Guy Gilbert, les amis de Jalna (équithérapie), l’association Lakou Bosco de Guadeloupe, les associations Garelli 95 et Amig 14 pour l’accueil de jeunes mineurs étrangers non accompagnés, les internats éducatifs de Tournai et Remouchamps en Belgique), et d’autre part avec le développement des associations adhérentes : ainsi, l’Institut Don Bosco a ouvert de nouvelles plateformes d’accueil de MNA, de nouvelles maisons d’enfants à caractère social et a repris la gestion de deux centres éducatifs fermés ; l’AIFST à Caen a repris une importante association de formation professionnelle ; le Valdocco a ouvert des antennes dans les quartiers nord de Marseille et à Saint-Dizier. Et à Caen cette semaine, il a été dit qu’il fallait continuer à densifier et développer le réseau, sa visibilité et ses moyens. »

Inspiration chrétienne et respect de la laïcité
J.-M. Petitclerc : « Dans le domaine de la prise en charge des jeunes en difficulté, la présence de l’Église s’est amenuisée. Bon nombre de congrégations religieuses, qui géraient ce type d’œuvres, ont pensé ne plus pouvoir faire face, avec la diminution de leurs effectifs, à l’animation et la gestion de ces établissements d’action sociale, et ont choisi de les confier à des associations laïques. Ce fut d’ailleurs le cas de nos sœurs salésiennes qui, rappelons-le, jusque dans les années 80, géraient un certain nombre de maisons d’enfants à caractère social en France. Aujourd’hui, dans bon nombre de ces établissements, gérés par des professionnels, la référence à l’inspiration chrétienne du fondateur s’est largement estompée, jusqu’à bien souvent disparaitre totalement.
Une fonction importante du réseau DBAS consiste à permettre à toutes les associations, se référant à l’héritage pédagogique et spirituel de Don Bosco, de s’allier pour ne pas courir le risque de perdre leur spécificité. Il nous semble important de souligner qu’il est encore aujourd’hui tout à fait possible de concilier inspiration chrétienne et respect de la laïcité. D’ailleurs, comme le rappelait saint Jean Paul II lors de son premier voyage en France (discours du Bourget), les valeurs républicaines Liberté, Égalité, Fraternité n’ont-elles pas une origine chrétienne ? Contrairement à ce que certains avancent, la laïcité est le moyen que se donne la République pour être garante de la fraternité, en exigeant le respect des convictions et pratiques religieuses de chacun. Tel est le cas dans les établissements et services du réseau DBAS. Il s’agit à nos yeux du dévoiement de la notion de laïcité lorsque ses défenseurs pensent qu’en son nom, il faut interdire toute forme d’expression spirituelle et religieuse. »

Mineurs migrants
J.-M. Petitclerc : « Don Bosco accueillait des jeunes qui migraient de la campagne vers la ville. Aujourd’hui, cette migration des jeunes s’effectue sur le plan international, des zones de pauvreté vers les zones de richesse. Et notre Recteur majeur de rappeler que cet accueil des jeunes migrants doit rester l’ADN de notre congrégation. L’Institut Don Bosco (Gradignan) est la première association à avoir répondu à cet appel, en créant leur première plateforme d’accueil de MNA lors du démantèlement de la jungle de Calais. Depuis, le réseau DBAS n’a cessé de développer de telles plateformes. Elles sont aujourd’hui une douzaine, en Nouvelle Aquitaine, en Normandie, en Savoie et en Ile de France. Près d’un millier de jeunes sont accueillis aujourd’hui dans notre réseau, devenu un important interlocuteur des pouvoirs publics en ce domaine. »

 

Une alliance avec Auteuil, l’Armée du Salut, etc.
J.-M. Petitclerc : « Afin de sauvegarder dans le secteur de l’action sociale la présence d’établissements d’inspiration chrétienne, nous travaillons à la construction d’une alliance œcuménique regroupant les grands acteurs ecclésiaux en ce domaine. Cette alliance comprend aujourd’hui six membres, trois d’obédience catholique (Apprentis d’Auteuil, DBAS, Prado), et trois d’obédience protestante (Armée du Salut, Foyers Matter, réseau associatif Salvert). Cette alliance s’est donné pour objectifs d’approfondir le sens de la référence chrétienne et d’enrichir les pratiques de ses membres, grâce aux échanges, et de mener des actions communes dans le domaine de la formation des éducateurs.

 

Prendre en compte les attentes spirituelles des jeunes accueillis
J.-M. Petitclerc : « Si tous les éducateurs conviennent que leur travail d’accompagnement consiste à répondre aux besoins corporels, intellectuels, affectifs, sociaux, des enfants et jeunes qu’ils accueillent, certains éprouvent un véritable malaise quand il s’agit de répondre aux besoins d’ordre spirituel, car ils craignent que l’apport d’une telle réponse soit contraire au principe de laïcité. Or, l’accueil aujourd’hui dans les établissements de notre réseau d’un grand nombre de jeunes musulmans ne permet pas d’enfouir ce questionnement.
Aussi le réseau DBAS a-t-il mis en place ce groupe de travail inter-établissements sur le thème de la prise en compte de la spiritualité dans le travail socio-éducatif, qui débouchera sur une journée d’études prévue à l’Institut Don Bosco de Gradignan le 9 juin. »

Propos recueillis par Benoit DESEURE

Oeuvres salésiennes