La Centreafrique au jour le jour. Un salésien sur place nous informe

16 janvier 2014

La Centreafrique au jour le jour. Un salésien sur place nous informe

Le 5 décembre dernier, à quelques jours de l’opération Sangaris, les anti-balaka (anti-machette) ont attaqué quelques bases des l’armée régulière (ex-séléka). Ils s’en sont suivies des représailles terribles et des exactions d’une part et d’autres (ex-seleka et anti-balaka) atroces. Des milliers de morts et des déplacés. Au total une cinquantaine des sites des déplacés à Bangui où vivent des personnes dans des conditions humanitaires très précaires.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Les musulmans dans la ligne de mire, qu’ils soient tchadiens, maliens ou sénégalais ont quitté le pays en masse.

Le 10 janvier 2014, à l’issue du sommet de Commission Economique des Etats d’Afrique (CEEAC) du jeudi 9 au vendredi 2014, le président de la transition et le premier ministre ont démissionné. Des scènes de liesses dans la ville et dans les sites de déplacés. Sur les réseaux sociaux des messages de soulagements. A la tombée de la nuit, des détonations d’armes lourdes et tirs ont retenti puis calme. Ce calme fut précaire.

Le conseil de la transition, selon les textes, de retour de N’Djamena, à Bangui, se chargera de choisir un nouveau président de la transition ainsi que le premier ministre.

Que seront les jours à venir ? Nous vivons dans l’inquiétude

Pour le moment, tout est en stand by. Il y a crise dans tous les domaines:

Au niveau de l’Etat: paralysie des structures étatiques.

Au niveau social : il y a des déchirures atroces, des plaies encore béantes que leur pansement et cicatrisation ne sont pas pour maintenant. A moins, qu’il n’y ait vraiment des concessions et des sacrifices, de part et d’autre, des deux communautés religieuses (musulmans et chrétiens) emballées dans cette machination politique. Les familles sont fracturées, exilées. La vie familiale est disloquée. Certaines familles sont partagées entre les sites des déplacés ou reparties chez les parents à travers la ville. Celles qui le peuvent se sont exilées.

Au niveau sécuritaire : il y a tellement d’armes dans la ville. Selon, les témoignages des jeunes, les grenades sont vendues comme des galettes. Au moindre discussion ou problème, les menaces de les lancer fusent. Les anti-balaka, les ex-seleka (même désarmés, certains ont encore des armes) et les anciens FACA ont des armes, selon certaines personnes. La ville est une poudrière comme l’avait remarqué un reporter de TV5. Le pire peut arriver! Des bandits et braqueurs en profitent.

 

Au niveau humanitaire: comme l’ont relayé les ONG humanitaires sur certains médias, le pays vit une catastrophe humanitaire. Les personnes ont faim. Les distributions des vivres dans certains sites des déplacés drainent les quartiers et se soldent par des bagarres et des détournements de tout genre. L’accès aux soins demeure un problème. Dans les sites des déplacés de Bangui, les risques d’épidémies sont patents.

 

Au niveau économique : certaines entreprises sont fermées, d’autres fonctionnent au ralenti ainsi que l’administration. La plus part d’acteurs économiques étrangers dans le domaine du commerce sont partis.

Au niveau éducatif : quelle éducation ? Quelle formation ? Les sphères éducatives (famille, état, école) sont déstabilisées rendant hypothétique l’éducation, incertain l’avenir des enfants et des jeunes, même l’avenir du pays car l’avenir d’un pays dépend de la bonne éducation de ses fils disait Don Bosco. Les cours dans certains établissements à Bangui sont stoppés. Y aura-t- la reprise des classes ? Rien n’est sûr !

La réalité est trop complexe pour espérer une amélioration rapide. Retrouver cet âge d’or passera par la résolution globale de la crise et ses ramifications. Comme fils de Don Bosco, je suis optimiste, au dénouement heureux de ce qui se passe mais, pas un optimisme utopique.

 

Maguergue Eynem,

salésien de Don Bosco à la communauté de Bangui,

paroisse saint Jean, oratoire, Centre de jeunes, dispensaire

16 janvier 2014

 

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