« Ils nous ont bluffés ! » Concours de plaidoirie à l’Institut Lemonnier

9 avril 2018

« Ils nous ont bluffés ! » Concours de plaidoirie à l’Institut Lemonnier

Chaque année un « concours de plaidoiries » met à l’épreuve les élèves du lycée agricole de l’Institut Lemonnier à Caen. Ils y défendent devant plusieurs centaines de personnes des valeurs humaines et citoyennes sur les thèmes d’actualité : immigration, fin de vie, diktat de l’apparence…. Interview de Béatrice Aubrée, chef d’établissement du lycée agricole.

 

« Après une année de travail, la qualité de leur argumentation et leur style oratoire ont « bluffé » les spectateurs. » Béatrice Aubrée

DBA : D’où est venue l’idée d’un concours de plaidoirie ?

Béatrice Aubrée : La direction du lycée agricole prend pour modèle le concours de plaidoiries qui a lieu tous les ans au Mémorial de Caen pour proposer le même challenge à ses élèves. Le concours au Mémorial concerne des étudiants en Droit ou qui se destinent au métier d’avocat. L’institut Lemonnier organise ce même concours à tous ses élèves de seconde de l’enseignement agricole. 40 élèves passent ainsi par groupe de deux ou trois sur des thèmes aussi divers que :

  • Le traitement des personnes âgées
  • Les immigrés
  • Les enfants soldats
  • L’apparence
  • L’esclavage moderne
  • Le diktat de l’apparence

Pourquoi organiser un concours de plaidoirie dans un lycée agricole ?

C’est une volonté de notre part de développer cette initiative : être capable de s’exprimer, de plaider. Il s’agit également de donner une fierté aux jeunes. C’est quelque chose qui est inscrit dans notre programme à l’Institut Lemonnier.

Comment organisez-vous l’apprentissage ?

Deux heures par semaine sont dédiées à la préparation de ce concours pour tous les élèves. Il y a tout un apprentissage de la gestuelle, de la prise parole. Quand ils arrivent ici, les élèves ne sont pas très surs d’eux, il faut tout retravailler. Les plaidoiries les obligent à se dépasser, dans la capacité à argumenter, à mémoriser un texte, à parler à un public. A la fin, nous sommes bluffés.

Comment les jeunes travaillent-ils le thème ?

Celui qui m’a marqué le plus est le thème de la maltraitance des personnes âgées, j’ai trouvé très fort qu’un jeune de 15 ans soit capable de dénoncer la maltraitance : « les personnes âgées c’est la mémoire de notre société ». Les arguments étaient très forts.

Quand présentent-ils leur plaidoirie ? Quel est le retour ?

Les élèves présentent leurs plaidoiries devant les secondes de collège filière générale et professionnelle. Puis devant les parents.

Après les avoir vus, souvent les parents disent : « On ne savait pas que notre fils était capable de faire cela ». Certains jeunes viennent de CAP, et arrivent en classe professionnelle complètement dévalorisés. Quand ils passent et qu’ils plaident les parents sont très fiers.

On a le « avant » plaidoirie et après. Avant, on des jeunes qui ont peur de passer et après, on a une fierté. Après avoir vécu cela il y a aussi une cohésion qui est formée dans la classe. On sent une complicité entre eux.

Y a-t-il une formation à la citoyenneté à travers cette plaidoirie ?

Bien sûr. Dans la vie de tous les jours on est toujours amené à prendre position, affirmer ses convictions.

Je dis aux jeunes : « Soyez fier de votre profession, soyez fier de ce que vous êtes et engagez-vous là où vous êtes ». Ici à l’Institut Lemonnier de nombreuses associations viennent au lycée pour intervenir et témoigner de leur parcours. Les jeunes rencontrent des personnes engagées, auprès des personnes en difficulté ou en insertion, dans le milieu du paysage ou de la vente.

Il y a ceux qui attendent, qui attendent le weekend, ou la retraite, et puis il y a ceux qui sont pleinement présent, pleinement heureux dans ce qu’ils font.
Je dis toujours que quelqu’un qui est bien dans sa peau, qui s’estime, apporte des valeurs citoyennes.

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