Saint Jean Bosco : comment tu faisais, toi ?
30 janvier 2024
Cher Don Bosco,
Je ne sais pas si la musique de notre Terre est diffusée jusqu’au paradis mais « Comment on fait ? », c’est le titre d’une chanson de Vianney et Zazie qui tourne en boucle à la radio et dans ma tête.
En réalité, ma question c’est plutôt : comment tu faisais, toi ?
Cher Don Bosco, comment faisais-tu pour que ton cœur cherche toujours plus loin ? Pour toujours faire ce pas de côté qui permet d’ouvrir de nouveaux chemins ? Pour savoir ce qui était bon pour Dominique Savio, pour Michel Magon et François Besucco ?
Comment tu faisais, toi, pour que l’audace soit ta certitude ?
Certains disent que tu n’avais jamais peur. Moi, je n’y crois pas. Je crois que tu avais peur pour chaque jeune que tu rencontrais, peur qu’il ne soit pas aimé, qu’il ne soit pas correctement aimé.
C’est peut-être même cette peur qui t’a fait soulever des montagnes, envoyer tes fils et tes filles en Patagonie ou en Chine, construire des basiliques et des maisons sans un centime en poche ou bien encore prendre le temps sur le quai d’une gare, à Carmagnola, d’entrer en relation avec ce jeune qui avait l’air d’un chef de gang.
Comment tu faisais, toi, pour avoir le sens du détail et une vision globale ? Comment tu faisais, toi, pour te laisser déplacer en permanence par Dieu ? Et pour à chaque fois redire « que ta volonté soit faite » ou bien même « que ta volonté soit fête » ?
Cher Don Bosco,
il y a quelques jours, un jeune me demandait si je connaissais chacun de tes rêves. J’ai dû reconnaître que non, tu as tellement rêvé, comment pourrais-je tous les connaître ? Sa question n’est pas anodine en cette année où nous célébrons les 200 ans du rêve qui a construit ce que tu es et ce que tu as fait.
Fêter l’anniversaire d’un rêve, il n’y a que notre famille salésienne pour faire ça, nous sommes les enfants d’un rêveur. Célébrer le bicentenaire d’un rêve, c’est le minimum.
Tu le sais déjà mais le rêve que tu fis à 9 ans et que nous célébrons cette année n’est pas mon rêve préféré.
Celui que je préfère est celui du pergola de roses. Quelle honnêteté et quelle vérité dedans. Il est là, le secret de Don Bosco ? Se réjouir pleinement de chaque pétale de roses et du parfum de celles-ci et accepter de vivre pleinement chacune des épines ?
Dans ton rêve, beaucoup t’abandonnent et d’autres, finalement, te suivent sur ce chemin de roses, parfumé et blessant. Vois aujourd’hui les milliers de frères, sœurs, volontaires, coopérateurs, anciens et amis, jeunes, tous ceux qui, de par le monde, sont vivants et donnent la vie grâce au charisme que Dieu a bâti en toi puis en chacun de nous.
Tu le sais aussi, parfois nous avons bien du mal à nous réjouir des pétales et à vivre les épines, mais ce chemin, nous voulons le vivre avec toi, à la suite du Christ, pour et avec les jeunes.
Comment faisais-tu toi pour ne pas renoncer devant « les épines qui déchiraient tes membres » (1) ?
Le mois de janvier est un mois de grandes festivités pour la famille salésienne, entre François de Sales que tu nous as choisi comme patron, Laura Vicuna, et puis toi, bien sûr. Nous rivalisons de créativité d’année en année pour faire goûter et célébrer ce qu’il nous est donné de vivre dans nos maisons grâce à toi.
On pourrait s’y méprendre et t’imaginer en super héros, mais tu n’es pas Super Jean Bosco, tu es Saint Jean Bosco. Un petit garçon qui a rêvé et qui s’est construit, choisissant toujours l’amour et la compassion comme guide, refusant la fatalité pour tant et tant de jeunes, tu as donné la vie, « la vie en abondance » (2). Tu es Saint Jean Bosco, cet homme bousculé par les aléas de la vie et de la mission, cet homme pris de compassion au point de pleurer pour ses jeunes un dimanche de Pâques, car tu ne savais pas, tu ne savais plus.
Cher Don Bosco,
Apprends-nous à nous laisser toujours bouleverser par chaque jeune que nous rencontrons, à nous laisser déplacer par ce que Dieu nous demande, à nous émerveiller à chaque progrès que nous observons et à nous rendre attentifs à ceux que nous ne voyons pas assez.
Apprends-nous la confiance en Dieu, celle qui laisse la tempête passer sans qu’elle nous effondre, celle-là même que tu as eue. Apprends-nous à ne jamais renoncer au bien des jeunes quelles que soient les épines que nous aurons. Apprends-nous ton audace et ton regard éducatif. Apprends-nous à rêver comme toi.
Accueille chacune de nos prières pour les porter à Dieu, accueille chacune des larmes que nous pouvons verser pour les jeunes que nous accompagnons. Transforme chacun de nos doutes en recherche du bien et du bon pour les jeunes, transforme chacune de nos erreurs en occasion d’apprendre pour grandir comme tu l’as fait.
Garde dans ton cœur chaque jeune de nos maisons partout dans le monde, garde dans ton cœur chaque membre de la famille salésienne.
Merci pour ce que tu nous laisses comme héritage éducatif et spirituel, les deux sont indissociables chez toi, qu’il en soit ainsi pour nous. Merci d’être Don Bosco, celui dont on connaît les rêves et les miracles, mais merci d’être Don Bosco dans le cœur de chacun de nous, d’être pour chacun de nous « notre Don Bosco ».
Soeur Anne-Flore MAGNAN
Salésienne de Don Bosco
Communauté de Bruxelles-Ganshoren
[1] Don Bosco, récit fait en 1864 et relaté par don Lemoyne, publié en 1903.
[2] Jn 10,10