Bertille, volontaire au Bénin : « J’ai tout de suite dit oui »

1 juillet 2013

Bertille, volontaire au Bénin : « J’ai tout de suite dit oui »

Bertille Pianet, éducatrice spécialisée, a suivi le camp de formation V.I.D.È.S à Lille. Quand la Sœur Marie-Bé lui a proposé de partir à Cotonou, elle a tout de suite dit oui, sans hésiter. « A cette époque, je ne savais pas où se trouvait Cotonou, ni même le Bénin ! Cela fait maintenant trois ans que j’y habite, et rien qu’à l’idée de quitter un jour ce pays et surtout mon travail, j’ai des pincements au cœur.

 

 

 

 

 

 

 

 

La première année à Cotonou, j’étais avec quatre autres filles de pays différents sous le même toit que les sœurs salésienne. Nous avons découvert ensemble le Bénin et ses réalités sociales. Aujourd’hui, nous sommes restées amies.

Dés le début, j’ai eu beaucoup de responsabilités !

Dès la première année de volontariat, j’étais responsable du suivi des différentes formations et de l’élaboration d’outils pédagogiques permettant l’évaluation des jeunes, et la recherche de lieux de stage et d’embauche pour les jeunes. Je faisais aussi du soutien scolaire chaque soir auprès des filles du grand foyer. Au bout de 3 mois, les sœurs m’ont proposé de coordonner un projet de sensibilisation sur des sujets difficiles dans 20 villages, auprès des groupes de femmes et des écoliers. Les thèmes abordés étaient : l’école, l’éducation des enfants sans châtiments corporels (encore très utilisés au Bénin), l’exploitation des enfants au travail…. Nous organisions des sensibilisations grand public devant plus de 400 villageois. L’objectif étant que les femmes et les enfants deviennent eux-mêmes acteurs, en présentant des sketchs et pièces de théâtre. C’était un travail épuisant : longs déplacements avec les moyens locaux, petites routes ensablées, soleil ardent. J’ai vraiment adoré ce travail, car je côtoyais les villageois, dont la façon de vivre est très différente de celle des citadins. D’autre part, fuir Cotonou deux fois par semaine, sa pollution, son trafic dangereux, son rythme de vie à 100 à l’heure, me faisait le plus grand bien. Je retrouvais la simplicité, le calme et la vie en harmonie avec la nature et découvrais le vrai sens de la vie en communauté. Je dois dire que ce travail me manque parfois !

Le travail à « La maison du soleil » est devenu presque une vocation

A la fin de cette année, les sœurs m’ont proposé de revenir pour la coordination de « la Maison du soleil ». C’est finalement sans trop d’hésitation que j’ai accepté. Je ne regrette pas ce choix … j’en suis à trois ans aujourd’hui.

Les sœurs salésiennes sont très engagées. Toutes leurs actions s’inscrivent dans un projet global de lutte contre l’exploitation des enfants. Ainsi elles ont ouvert différentes structures : foyers pour filles, école, centre de formation, la ferme, l’espace éveil, et la maison du soleil.

A Cotonou, il y a le marché Dantokpa, un des plus grands de l’Afrique de l’ouest, qui s’étend sur plus de 18 hectares et qui ne cesse de s’agrandir. Malheureusement, il est aussi connu pour le grand nombre d’enfants qui, dès leur plus jeune âge, se retrouvent exploités à des fins commerciales. Ils travaillent toute la journée, sans recevoir aucun autre salaire ou compensation que des coups et des humiliations. Le marché est également le théâtre de nombreuses violences sexuelles. Face au nombre de jeunes filles victimes de viol ou tombant prématurément enceintes, les sœurs salésiennes ont mis en place un projet de lutte. Le poids culturel et traditionnel pèse encore sur les femmes qui, lorsqu’elles ont subi des violences, ne sont pas reconnues comme victimes. Bien souvent, le problème va se régler à l’amiable entre les deux familles moyennant de l’argent.

 

La maison du soleil, ouverte en juin 2011, accueille des « filles-mères » victimes ou non de violence sexuelle. Je coordonne les activités de la maison et une équipe de 8 personnes. Nous permettons à ces jeunes mamans célibataires, souvent exclues de leur milieu familial et victimes de viol pour la plupart, de retrouver l’espoir d’un avenir serein. Ainsi, pendant que des puéricultrices gardent leurs enfants aux heures de cours, elles vont apprendre un métier à la Maison de l’Espérance.

L’accompagnement des filles-mères est une course permanente

Accompagnées par un animateur social et un psychologue, nous allons rencontrer les familles des jeunes mères afin de recréer les liens rompus et envisager une réinsertion familiale. Les papas des enfants, lorsqu’ils ne sont pas les agresseurs sexuels, sont également recherchés et amenés à assumer leurs responsabilités. Lorsqu’il s’agit d’une agression sexuelle, nous aidons les jeunes mères à « porter plainte » et les accompagnons dans le suivi judiciaire grâce à l’appui d’un juriste.

 

Je connais des déceptions chaque jour. Parfois, il me semble que nous nous préoccupons d’avantage de l’avenir de ces jeunes filles qu’elles-mêmes ou que leurs propres familles !! C’est une course permanente pour impliquer et responsabiliser les familles et surtout les pères. Les filles elles-mêmes sont difficiles à canaliser : il y a beaucoup d’agressivité et de violence en elles. Elles rejettent l’autorité et même leur enfant parfois. Si on ne se rappelle pas régulièrement que leur comportement est la manifestation de ce qu’elles ont vécu, on peut vite avoir envie, face au peu d’efforts fournis, de cesser nous-mêmes tous les efforts déployés au quotidien.

Ce qui me motive à rester, c’est que le travail à accomplir ici est essentiel et se situe à la base : le respect des droits humains fondamentaux. Les conditions de travail sont parfois difficiles. On côtoie au quotidien la pauvreté et la violence physique et morale. Du coup, on a l’impression que tout va mal alors que ce n’est pas le cas. Il y a au-delà des moments de joie beaucoup de déceptions et de frustrations aussi car c’est au poids de la tradition que nous sommes confrontés chaque jour. Il faudra encore de nombreuses années pour que les croyances changent et que les droits humains fondamentaux soient un jour respectés et appliqués au Bénin.

Le travail que je mène ici se situe à la base. Il s’agit d’éveiller les consciences.

L’implication personnelle est mon principal outil de travail. Ce qui me motive à poursuivre ma mission ici c’est que je travaille pour la connaissance et la reconnaissance des droits des enfants et des femmes. Le travail à accomplir ici se situe à la base : l’éveil des consciences, la mise en place d’un réseau de communication autour de la promotion des droits des femmes et des mineurs, la mise en place d’un réseau de partenaires impliqués dans la protection et la prise en charge des victimes.

Le plus frustrant est que je ne verrai sans doute jamais le résultat de nos actions. C’est un peu comme planter une graine. On ne la voit pas forcément germer et pousser. Pour qu’elle germe, il faut que toutes les conditions soient réunies. Or, elles ne dépendent pas toutes de nous et viennent progressivement.

 

Mon plus grand souhait est qu’un jour l’état béninois s’implique concrètement auprès des ONG comme celle des sœurs salésiennes. Ce qui signifiera qu’il veut promouvoir la solidarité nationale par la participation active des citoyens et des autorités nationales compétentes.

Au quotidien, je reste une blanche en Afrique

Le plus difficile est d’avoir la peau blanche car je suis sans cesse sollicitée dans la rue pour donner de l’argent ou des cadeaux. D’autre part, aucun tarif n’étant affiché, c’est à la tête du client que les prix sont fixés, et le jeu de la négociation devient pour moi encore plus compliqué !! Enfin le moyen de déplacement ici est le taxi moto. Malheureusement les règles de la circulation sont peu respectées et l’imprudence des chauffeurs me donnent l’impression de risquer le pire à chaque déplacement !!
Durant cette année, j’ai aussi eu la chance ce rencontrer des béninois devenus des amis, et avec qui nous avons partagé des moments mémorables. Ils nous ont permis au-delà de la découverte du pays, de mieux comprendre et appréhender tout ce que nous vivions sur ce sol si étranger à nos yeux.

 

Mon retour en France sera difficile. J’espère trouver un travail qui saura me combler ! Ce qui me pousse à rentrer, c’est l’envie de retrouver ma famille et mes amis qui me manquent beaucoup et que j’ai parfois l’impression de laisser égoïstement tomber !! Je ne remercierai jamais assez le Vidès et les sœurs salésiennes de m’offrir la chance de vivre une expérience si riche humainement parlant.

BERTILLE PIANET
Educatrice spécialisée,
coordinatrice de la Maison du soleil
4 juillet 25013

 

QUE FONT LES SOEURS SALESIENNES A COTONOU ?

 

  • DEUX FOYERS pour les filles victimes d’exploitation, d’abandon ou de maltraitance assure : protection, scolarisation/ formation à des métiers tel que la couture ou la coiffure, enquête sociale et réinsertion familiale.
  • L’ECOLE ALTERNATIVE, SAINT JOSEPH, permet à des filles de plus de 11 ans, de commencer une scolarité avec un programme accéléré. Elles préparent le Certificat d’Etude Primaire en 3 ans au lieu de 6.
  • LA MAISON DE L’ESPERANCE : centre de formation pour les filles et garçons issus d’un milieu démuni, victimes ou non d’exploitation. Ils peuvent y apprendre au choix les métiers de la boulangerie, la pâtisserie, la cuisine/art ménager et enfin la savonnerie. A l’issue de la formation, ils reçoivent un diplôme et bénéficient d’une aide à l’embauche.
  • LA FERME « LA VALPONASCA » propose une formation agropastorale aux filles issues des villages de l’Ouémé-plateau, zone essentiellement agricole d’où partent beaucoup d’enfants pour travailler au Nigéria et à Cotonou.
  • L’ESPACES EVEIL : les sœurs salésiennes ont ouvert au cœur même du marché, mais aussi dans les quartiers alentours, des espaces situé au coeur même du marché accueillant des enfants en âge préscolaire pour qu’ils puissent bénéficier d’activités propres à leur âge. Un appui est également donné aux parents pour scolariser les enfants dès qu’ils en auront l’âge.
  • LA MAISON DU SOLEIL, ouverte en juin 2011, accueille des « filles-mères » victimes ou non de violence sexuelle. Depuis cette date, je coordonne les activités de la maison et une équipe de 8 personnes. Nous permettons à ces jeunes mamans célibataires, souvent exclues de leur milieu familial et victimes de viol pour la plupart, de retrouver l’espoir d’un avenir serein. Ainsi, pendant que des puéricultrices gardent leurs enfants aux heures de cours, elles vont apprendre un métier à la Maison de l’Espérance.

 

 

 

 

 

Pour aller plus loin

  • Camps de formation au volontariat V.I.D.È.S du 3 au 18 juillet 2013 (Lille) et du 6 au 20 juillet 2013 (Bruxelles). Les camps de formation au volontariat sont ouverts à tous ceux qui souhaitent préparer une expérience de volontariat à l’étranger ou s’occuper d’enfants et de jeunes qui en ont le plus besoin en Belgique ou en France (Lille).Ce volontariat allie vie de groupe, animation d’enfants, découvertes culturelles et temps de prière. Partir cet été avec le VIDÈS.
  • Pour comprendre l’articulation entre les camps de formation et les séjours à l’étranger, une présentation des objectifs du V.I.D.È.S : lire l’interview de MB. Scherperel
  • Retrouver les témoignages d’Adeline, Félicité et Aloïse, volontaires parties avec le Vidès, sur le site www.vides-france.com
  • Pour en savoir plus : Contact pour la Belgique: Sr Bénédicte Pitti sur le site du Vidès Belgique : www.salesiennes-donbosco.be

    Contact pour la France : Sr Marie Bénédicte Scherperel sur le site du Vidès France : www.vides-france.com

 

 

 

Témoignages