« Médiation et sanction doivent se compléter »

28 janvier 2017

La mise en place d’un dispositif de médiation dans une institution éducative constitue un excellent moyen d’apaisement des tensions et de régulation des conflits. Mais la médiation est-elle une réponse à tout ? Regard de Jean-Marie Petitclerc, salésien de Don Bosco.

 

La médiation permet d’apporter un regard neuf et apaisé sur la situation, par l’expression calme et franche des différents points de vue et la prise en compte des intérêts différents des uns et des autres. Elle débouche sur un apaisement des tensions et la restauration d’un climat plus serein.

A quoi sert un médiateur ?

Souvent un conflit se déroule en deux phases. Il y a d’abord conflit d’objet, qui détermine le motif du conflit. Mais, très vite, ce conflit d’objet vire au conflit de personnes. Celles-ci s’invectivent et modifient le sens du conflit.

C’est ce que j’observe la plupart du temps sur une cour de récréation, au sein des collèges. Un jeune a reçu malencontreusement un ballon (conflit d’objet), mais très vite les insultes fusent et les jeunes en viennent aux mains, non à cause de l’objet du conflit, mais à cause de la portée des insultes. L’intervention du médiateur, qui favorise l’expression du ressenti de chacun, tout en respectant le point de vue de l’un et l’autre, permet de revenir au conflit d’objet.

« La médiation n’est pas un dispositif alternatif à la sanction. »

La sanction en plus

La médiation permet la régulation du conflit de personnes, mais ne dispense pas de mettre en place une sanction appelée à réguler le conflit d’objet. La sanction fonctionne comme outil de responsabilisation de l’auteur. Quand il y a uniquement transgression de la règle, la médiation n’a pas lieu d’être, et seule la pratique juste de la sanction constitue la réponse adéquate.

La pratique de la médiation et celle de la sanction doivent se compléter au sein de l’institution éducative. Contrairement à ce qui peut être dit ici ou là, la médiation n’est pas un dispositif alternatif à la sanction. Au contraire, il est important de savoir conjuguer médiation et sanction dans une perspective éducative.

Jean-Marie Petitclerc,
Salésien de Don Bosco.

 

 De la sanction selon l’esprit de Don Bosco :

 

Système répressif Système préventif
  • Sanctionne des transgressions
  • Sanction pour dresser les comportements du jeune
  • Sanction nie la raison du jeune
  • Relation basée sur la méfiance
  • Sanction inscrite dans une relation de distance
  • Sanctionne des progressions
  • Sanction dans laquelle on s’adresse à un sujet
  • Sanction qui s’appuie sur la raison du jeune
  • Relation basée sur la confiance
  • Sanction inscrite dans une relation de proximité

 

Le regard est important et parfois ne suffit pas. Dans sa pratique éducative, Don Bosco veillait à faire la différence entre l’acte commis et la personne, entre les mots « sanction » et « punition». Son système préventif veillait à remettre le jeune debout.

Le regard de Don Bosco 

Don Bosco avait une mauvaise vue. A la fin de sa vie, il avait perdu complètement l’œil droit, et le gauche était si faible et fatigué qu’il resta des mois sans pouvoir lire. Et pourtant, de nombreux témoins parlent de son regard pénétrant. Un regard vif et lumineux qui captait le regard d’un jeune sur la cour. Un regard plein de douceur, qui allait droit au cœur et qui remuait celui qui était ainsi regardé avec attention et affection. Un regard qui manifestait une connaissance profonde du jeune. Le regard d’amitié de Don Bosco était une récompense, une source de joie, comme une explosion de bonheur. Tandis que le regard triste et désapprobateur était ressenti douloureusement, par celui qui prenait conscience de sa faute. Certains évitaient ce regard, mais étaient travaillés par le remord. Beaucoup l’ont ressenti comme une invitation à se confier et à se réconcilier par le sacrement de la confession.

Le regard de l’éducateur sanctionne sans paroles. Il approuve et fait exister, il exprime la désapprobation, la déception et fait baisser les yeux. Il invite à renouer le contrat d’amitié si important pour les jeunes et les moins jeunes. Pouvoir se regarder dans les yeux face à face, dans la transparence, est un bonheur. La plus belle bénédiction dans la Bible ne dit-elle pas : « Qu’Il fasse pour toi rayonner son visage, que le Seigneur te découvre sa face … ! »

 

Jean-François Meurs, sdb

 

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